mardi 27 novembre 2012

Ragù alla Bolognese

Ami Lecteur,

Les derniers rayons qui au crépuscule caressent les terrasses de citronniers surplombant la falaise, la douce rumeur de la passagietta sur la piazza quand le premier Spritz se fait promesse d'une nuit pleine d'étoiles, les parfums de thym et de laurier qu'exhalent les sous-bois, voici les souvenirs que comme les escalves en choeur, nous envoyons sull’ali dorate, Va, ti posa sui clivi, sui colli, Ove olezzano tepide e molli L'aure dolci del suolo natal... et dont, dans l'étreinte glacée des premiers signes de l'hiver, nous nous efforçons de préserver les fragments pour les resservir dans le creux des frimas autour d'une belle tablée devant une belle flambée.

Et comment mieux réjouir les coeurs, ami lecteur, qu'avec cette recette de Ragù alla Bolognese? eh, sans doute en attirant ton attention sur la série de trois épisodes que cette recette veut inaugurer, ce premier épisode consacré à la recette classique, attestée en 1982 par l'Accademia della Cucina Italiana (ou presque), le second à arriver bientôt, sur la technique de conservation appliquée à ce même Ragù, et le troisième à l'utilisation des pâtes et de la sauce.

Plongeons donc, ami lecteur, dans le vif du sujet, nous gageons que ta patience a suffisamment été mise à l'épreuve par notre absence des temps derniers.

Ingrédients (pour 4):

  • 150 grammes de viande de boeuf hachée;
  • 150 grammes de viande de porc, hachée elle aussi; (ou bien 300 grammes de viande hachée mélange porc boeuf);
  • 75 grammes de pancetta;
  • 1 oignon;
  • 1 belle carotte;
  • 2 branches de céléri;
  • 1 petite boite de concentré de tomates;
  • 250 ml de bouillon de boeuf;
  • 1 verre de vin rouge (bien charpenté, idéalement un sangiovese de bon aloi);
  • 1 verre de lait entier; et
  • beurre, huile d'olive, sel, poivre.
Mise en place:
  1. Hacher l'oignon et couper le céléri et la carotte en brunoise (cubes de 5mm de section). 
  2. Dans une grande poêle, de préférence non-anti-adhésive, faire suer ces légumes à feux doux avec de l'huile d'olive et - eh oui, c'est le Norrrd - du beurre.
  3. D'autre part, mélanger les viandes si ce n'est pas déjà fait et y ajouter la pancetta découpée en petits cubes. Quand les légumes ont bien sué (soit 5 minutes de cuisson), y ajouter la viande hachée et la pancetta et bien rissoler le tout en remuant à intervalles régulières.
  4. Déglacer ensuite avec le vin rouge et laisse mijoter.
  5. Dans un récipient séparé, délayer le concentré de tomates avec 10 cl de bouillon, et ajouter ce mélange à la préparation une fois que le vin est évaporé.
  6. L'ami lecteur prudent aura bien sûr goûté la préparation depuis longtemps, mais si ce n'est pas le cas, c'est le moment de le faire, et de rectifier l'assaisonnement.
  7. Ensuite, laisser mijoter à feu doux pendant une heure et demie, en ajoutant le reste du bouillon au fur et à mesure et à mesure du nécessaire, et, à la fin de la cuisson, le lait.
Envoi:
Pas d'envoi qui tienne, ami lecteur, la sauce de base que voici pouvant servir de base à force recettes (lasagnes, pâtes à l'oeuf, timbales de pâtes, polenta...).

Miscellannées:
Une variation amusante est le "Ragù bianco", où le vin rouge est remplacé par du vin blanc, et où l'on omet l'usage de concentré de tomates. Le "Ragù alla Napoletana" - à l'origine de notre spaghetti bolognaise - se prépare tout à fait différemment, puisqu'il est composé non de boeuf ni de porc, mais de veau, pas haché mais taillé à la feuille, qu'il convient de faire revenir doucement avec de l'huile et des oignons, puis cuits trois heures dans une abondante quantité de passata.

Pour entretenir la conversation:
L'ami lecteur ami de l'exactitude et de la précision pourra bien sûr faire remaquer à ses commensaux qu'en français, l'adjectif relatif à la ville de Bologne est bien bolonais, ou bolonaise... ce qui semble être une surprise même pour le correcteur orthographique de la maison Blogspot.com. Eh oui, le Bolognaise partout présent sur les cartes de nos restaurants (d'entreprise) n'est qu'une mauvaise transcription de l'italien Bolognese.

Pour continuer sur le sujet, le l'ami lecteur pourra, s'il n'a pas trop peur de jeter un pavé dans la mare, souligner avec raison que le "Spag Bol" ne peut exister en cuisine italienne classique, et n'est qu'une vile adjonction de morceaux de recettes de toute la botte, ce pourquoi, en Italie, il sera impossible se faire servir ledit spag bol. Et pour cause, Bologne, ville prospère du nord, connaît plutôt les pâtes à l'oeuf que les pasta asciutta (les pâtes "sèches"). Aussi le Ragù Bolognese s’accommode-t-il plus volontiers de tagliatelles  ou bien sûr de lasagnes ou de polenta, produits bien plus typiques de l'Emilie que le spaghetti d'origine napolitaine. 
En outre, le Ragù Bolognese est très peu tomaté, et comme l'illustre la variation de Ragù bianco, il est probable que l'adjonction de tomate ne soit que plus tardive (en France, ce n'est qu'avec Diderot, à la fin du XVIIIème siècle, que la tomate ne commence à se consommer).
Or on sait que la tomate est consommée dès le début du XVIème siècle à Naples, alors possession espagnole et en contact avec les produits du nouveau monde. Quod erat demostrandum.

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