mardi 9 février 2010

Le Coq au Vin

Ami lecteur, l'architecture a le dôme de Brunelleschi, la sculpture descend du Discobole, la peinture, de la Naissance de Vénus. La musique classique connait la Lettre à Elise, la poésie épique, l'Iliade, l'opéra, les Noces de Figaro. Plus près de nousle film de guerre nous a donné le Pont sur la rivière Kwaï, la photographie, Le Baiser de l'Hotel de Ville et la bande dessinnée Les bijous de la Castafiore. [Le lecteur érudit trouvera un ordre certain à cette énumération]. L'art culinaire, quant a lui, a aussi ses classiques intemporels, au nombre desquels on trouve, c'est certain, le Coq au Vin, un plat qui relève de la fine gastronomie sans renier ses origines profondément ancrées dans la cuisine bourgeoise, voire paysane (après tout, Claudel avait bien vu que Beaucoup de gens croient avoir le goût classique, qui n'ont que le goût bourgeois
Avertissons immédiatement le lecteur pressé qui a poussé le bouton "Plus de détails" que cette recette nécessite de faire mariner la viande entre 12 et 24 heures, et que, sauf à vouloir réserver le même sort à quelque commensal annoncé plus tôt, il se réfèrera utilement à l'une ou l'autre alternative que ce blog commence tout doucement à compter.

Ingrédients (pour 4):
  • un beau chapon (qui est un coq châtré dans son plus jeune âge), qu'on peut avantageusement remplacer par un bon poulet, de Bresse par exemple - mais ne lésinons pas sur la qualité;
  • une bouteille de Bourgogne;
  • 2 oignons;
  • un bouquet garni;
  • quelques oignons grelots;
  • 3 carottes;
  • 7 grains de poivre;
  • une ou deux gousses d'ail;
  • 4 ou 5 branches de persil;
  • 200 grammes d'excellent lard;
  • 250 grammes de champignons de Paris; et
  • sel, poivre et beurre.
Mise en Place:
1. Couper le chapon ou le poulet en morceaux (d'abord en deux le long de la colonne, puis dégager le blanc, la cuisse, et la poitrine et l'aile). La carcasse peut servir pour un bouillon.
2. Mettre ces morceaux découpés dans un grand récipient, couvrir de vin, ajouter un oignon haché, les carottes, hachées elles aussi, le bouquet garni et le poivre.
3. Laisser mariner de 12 à 24 heures. Pour passer le temps, référez vous au blog de Sybille, en cliquant à gauche.
4. Sortir les morceaux de la marinade. 
5. Dans un cocotte, faire fondre une noisette de beurre, et saisir à feu vif les morceaux de viande sur toutes les faces.
6. Ajouter ensuite les légumes sortis de la marinade (oignon et carotte) ainsi que l'ail en haché très menu (mais pas écrasé de préférence) et cuire encore quelques minutes en remuant.
7. Couvrir avec le vin de la marinade, et laisser mijoter tranquilou pendant deux heures. Pour passer le temps, référez-vous au blog de Strépy, à qui nous dédions la présente, toujours en cliquant à gauche.
8. Ce dernier étant nettement plus court, il vous reste une demi-heure avant la fin de la cuisson du coq pour préparer la fricassée: dans une poêle bien chaude, faire d'abord revenir le lard coupé en dés. Quand il est bien croustillant, le débarrasser et faire suer les oignons grelots dans la même poêle. Remettre ensuite le lard et le persil haché, cuire encore un peu à feux doux. Pendant ce temps rectifier l'assaisonnement du coq.

Envoi:
Afin d'éviter les drames sur la nappe en taffetas blanc damassé de belle-maman, dresser dans une assiette à soupe préalablement réchauffée un morceau de coq, un peu de sauce au vin et une cuillère à soupe de fricassée. Les soeurs cholestérol préconisent de d'abord lier la sauce au beurre manié, mais ce n'est franchement pas nécessaire. Servir aussitôt, avec un pomme duchesse pour attraper la sauce.

Miscellanées:
Ceci est un version assez classique mais on peut ajouter de céléri à la marinade, cuire dans un mélange de vin et de bouillon de poule,... En Alsace, on prépare le Coq au Vin avec du vin blanc, et dans le Jura avec du vin jaune. C'est très bon, pas besoin d'épicer comme ci-dessus, et la fricassée peut être remplacée par des morilles à la crème.

Fautes de goût:
Azorin disait que "Plus elle se prête au changement, plus l'oeuvre classique est vitale." Réfléchissons bien à ceci, et la limite entre l'adaptation heureuse et la faute de goût nous paraitra à tous "cristal clear".

Pour entretenir la conversation:
Si les poules et les poulets ont leur place dans la basse-cour pour assurer au fermier oeufs frais et viande en quantité, le coq est, quant à lui, sans beaucoup d'utilité, puisque depuis l'apparition du réveil-matin, le soleil se lève qu'il chante ou non. L'unique intérêt de l'animal, c'est la perpétuation de l'espèce. Or, avec l'âge, tant chez l'homme que chez le coq, certaines raideurs se déplacent d'un endroit que nous ne nommerons pas ici, aux muscles et articulations. Si l'homme a trouvé des expédients, pilules ou chirurgie, pour parer à ces effets du temps qui passe, chez le coq, une seule issue à ce fatal destin, terminer son honorable vie à mariner dans du vin pour que la viande s'attendrisse devant ce triste spectacle.

Aujourd'hui, les coqs meurent de leur belle mort, et on consomme plus couramment les poulets à la chair bien plus tendre, mais le nom de coq au vin est resté, même s'il y a très peu de chance que vous ne mangiez jamais de ce fier gallinacé qui nous toise du haut de son clocher.

Et surtout un excellent appétit si vous passez à table.

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